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J’ai testé pour vous… l’aller-retour Aire-sur-la-Lys / Lillers, sans prendre la voiture (comme ils ont dit à la télé, mais en trichant un peu)

Alerte orange! C’est un peu tard en saison mais il faut faire avec, pas trop le choix, la neige est de retour depuis lundi, un épisode remarquable selon Méteo France. Alors on s’est évertué à rallier Lillers au départ d’Aire-sur-la-Lys (la ville de résidence de votre cher rédacteur), et de rentrer, le tout sans bagnole. L’intérêt? Bonne question. Au départ l’idée était de faire un reportage photo à Lillers… et puis sur la route on s’est dit qu’il serait bon de raconter la petite aventure, parce que c’en est une!
8h30, le réveil sonne. On l’éteint, logique. 9 h, il sonne à nouveau, on se réveille et on jette un œil à Facebook. Apparemment, dans l’Artois c’est l’apocalypse. Un mètre de neige par endroit, l’épisode a en effet l’air exceptionnel. On ne compte plus les statuts témoignant des galères des Facebookeurs (on dit Facebookiens peut-être?). « Pas pu aller au travail », « je suis bloqué » par ci, « j’ai mis une heure pour faire 5 km » par là, ou « restez chez vous surtout »… bref, c’est la galère. Le problème c’est qu’à Aire-sur-la-Lys, on ne voit pas plus de neige que la veille, et au premier regard, ça roule très bien. Alors direction Lillers, pour se rendre compte sur place de ce qui est vraiment. Idée saugrenue ou pas, étant donné qu’à la radio ils disent de ne pas prendre la voiture, on va se rabattre sur le deux roues à pédales, un bon VTT, vélo tout terrain qui va se révéler pas tout-terrain du tout.

Les pompiers s’agacent
11h (c’est long un réveil hivernal), on quitte sa promise un peu inquiète: « t’es fou, une voiture va glisser et te percuter ». Manteau, gants, chaussettes et pantalon de ski, bonnet péruvien, moon boots, quelques gâteaux, une bouteille de Yop et surtout… l’appareil photo! Premier hectomètres, tout va bien, on rejoint la RD 943, la Nationale 43 pour les plus âgés et là surprise, c’est un peu plus compliqué. Sous la neige, une effrayante pellicule de glace, mais on avance encore, on pose le pied à terre par endroits, mais on avance. À Lambres-lez-Aire, ça devient carrément impraticable, il y a un peu de relief il faut dire. Petite(s) frayeur(s) dans la descente qui mène au rond-point de Mazinghem, on traverse Norrent-Fontes sans encombre et là, en sortant de la commune de résidence des Intrépides, on aperçoit au loin des gyrophares bleus, et une petite file de véhicules à l’arrêt. Un automobiliste (âgé) est bloqué, impossible de bouger. Les pompiers de Lillers sont sur place, pour tracter le malchanceux. Le chef de centre Frédéric Delattre rumine sa colère: « les gens n’écoutent pas la presse c’est pas possible! On a que des interventions de ce genre depuis ce matin, on n’arrête pas ». On poursuit notre chemin, et ça frise l’inconscience. Le vent glacial qui donne à la 43 des airs de Sibérie balaye la plaine et forme des congères en bord de route. Le spectacle est incroyable, et dire qu’il y a trois jours, on s’affairait au jardin et pensait barbecue.
« Je fais comment pour rentrer chez moi? »
On n’y voit plus rien par moment, la Sibérie on vous a dit. On pose pied à terre dès qu’un camion s’apprête à doubler pour ne pas causer d’accident… ça fait franchement froid dans le dos (au figuré seulement, on est bien couvert), la chaussée n’est praticable que sur une moitié seulement, les automobilistes peinent à se croiser. Un quad arrive à grande vitesse et nous avertit. « Passez par Bourecq, les chasse-neige arrivent ils ne vous verront pas ». Qu’importe. On se cale derrière la glissière de sécurité, et on attend sagement de se faire éclabousser … un régal. Puis impossible d’avancer, on descend de vélo et on pousse. Certains klaxonnent pour se moquer, d’autres font un signe de la main, esquissent un sourire pour encourager. Dur quand même. Rond-point du Plantin à Lillers on touche au but, tant bien que mal. Votre dévoué rédacteur n’est pas un piètre cycliste et pourtant, il a mis une heure pour la dizaine de bornes. Il n’aurait jamais pensé. À chaque sortie ou presque, un agent des services techniques de la ville brieffe les conducteurs. Midi, interdiction de rallier Aire-sur-la-Lys via Isbergues, même chose via Lambres-lez-Aire, ça vient d’être décidé. Une jeune fille s’agace. « Je fais comment pour rentrer chez moi? Ok je regarde ce que me dit le GPS ». Elle se met sur le côté, consulte son téléphone puis s’éloigne en direction de l’autoroute A26. On espère alors que le parcours Thérouanne-Aire est faisable pour elle. En ces temps de conclave, une prière s’impose. Cap sur le centre-ville de Lillers, pour s’atteler à l’exercice envisagé au départ. Déception.
La Nationale à pied
En arpentant la rue Adolphe-Dekeyser, on s’aperçoit qu’en fait, ce n’est pas aussi terrible que cela (dans Lillers on s’entend). Il y a bien quelques voitures alourdies par des amas de neige, mais rien d’exceptionnel. Même chose rue d’Aire, rebelote place Roger-Salengro et place Jean-Jaurès. Les toits ne sont même pas blancs, pour les jolies photographies, on repassera. Ceci dit, pour le retour, ça se fera à pied. Madame avait raison ce matin, la pratique du vélo n’est pas prudente et l’aller n’avait rien de très rassurant. Un petit détour par la place de l’église plus tard (on s’est dit que ce serait plus « parlant » dans les petites rues, mais non), on se dirige vers le rond-point Sécuritest via la rue d’Ham. On pense alors que ça aurait pu être le bon jour pour braquer une bijouterie, les forces de l’ordre doivent avoir bien d’autres choses à faire, et à ce moment précis (à 12 h 44 exactement) que l’on aperçoit un malheureux cabot en train de dévaliser une poubelle, chacun son truc. Il a l’embarras du choix, les rippeurs ne sont pas passés aujourd’hui. Retour sur la RN 43, à pied cette fois (c’est super drôle de pouvoir traverser tranquillement la nationale!), on contemple Ham-en-Artois de loin, c’est beau. On surplombe la voie ferrée, c’est calme! À hauteur de l’ex garage Jean-Loir, une dame est bloquée avec sa Peugeot 206 essence. On se mue en valeureux chevalier et on se met au volant pour la tirer de là. Un sourire. Retour au rond-point du Plantin, la situation a un peu évolué. Les voitures sont à nouveau autorisées à traverser Norrent-Fontes. On photographie une pelleteuse au travail, le conducteur n’est pas peu fier, content qu’on s’intéresse à lui visiblement. Il fait d’énormes tas de neige sur le bas-côté.

Tricherie
La route promet d’être longue. Trop longue. Un peu las, l’idée de faire du stop nous traverse l’esprit… bingo. Sans trop tarder, une dame au volant d’une Skoda rouge s’arrête. Elle nous embarque. « Je viens de me faire emboutir à Lillers » raconte-t-elle. On a raté cela. Elle poursuit. « Mais la voiture n’a rien, j’ai un attache remorque ». Ravi pour notre héroïne. « Vous allez où? » nous demande-t-elle. « Aire? Je peux vous amener jusque Norrent-Fontes ». Déjà pas mal. Le professeur au collège Bernard-Chochois nous explique alors qu’elle est allée travailler ce matin, mais qu’ils n’étaient pas beaucoup à l’avoir fait. Les cours ont été annulés, jusqu’à mercredi inclus. Quelques centaines de mètres plus loin, un semi-remorque est en difficulté. Elle bifurque par Saint-Hilaire, très à l’aise sur la neige, sa fille, assise sur le siège passager a prévu d’aller à Lille ce soir. Maman n’est pas forcément très rassurée. Notre chauffeur nous dépose à Norrent-Fontes. On continue à pied, mais pas pour longtemps. À Mazinghem, les gendarmes viennent de couper la route pour Lambres. Zut. Malgré cela un agent du conseil général passe outre l’interdiction. Il travaille à la gestion de cet état de crise en fait. Il s’arrête, nous embarque à son tour. « J’ai 59 ans, je n’ai jamais vu cela. Beaucoup de neige oui, mais pas des congères comme ça ». Un épisode remarquable ils disaient. Pour une fois ils ne s’étaient pas trompés. A.Top
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